Tunisie : l’expert de l’ONU Moncef Kartas remis en liberté provisoire

L’expert onusien Moncef Kartas a été remis en liberté provisoire, mardi 21 mai, par la chambre des mises en accusation près la Cour d’appel de Tunis. Appris par Jeune Afrique, si l’enquête et l’instruction se poursuivent, la décision a surpris, après l’intransigeance montrée dans un premier temps par la justice tunisienne.

Arrêté le 26 mars à l’aéroport de Tunis, Moncef Kartas, membre du panel d’experts du comité du Conseil de sécurité des Nations unies sur la Libye, était détenu pour « collecte de renseignements et données relatifs à la lutte contre le terrorisme et à leur divulgation dans des circonstances autres que celles autorisées par la loi ».

Il lui est également reproché de détenir des équipements d’interception et de brouillage de communications, ainsi que du matériel servant au balayage radio. Sa libération intervient suite à une demande de libération provisoire formulée par ses avocats. Toutefois, l’enquête et l’instruction se poursuivent.

Selon un magistrat contacté par Jeune Afrique, Kartas n’aura probablement pas le droit de quitter le territoire. Notre source judiciaire confie néanmoins, sous le sceau de l’anonymat, que « cette libération est un signe révélateur. Le dossier n’est peut-être pas aussi consistant qu’il semblerait, sinon le magistrat instructeur n’aurait pas accédé à la demande de la défense. »

Une hypothèse probable, dans la mesure où Mohamed Manoubi Ferchichi, avocat de Moncef Kartas, avait démontré que les services de l’ONU étaient informés de l’utilisation par leur expert de l’équipement saisi dont l’appareil « RTL-SDR ». Dans une correspondance aux autorités tunisiennes, ils ont précisé que cet appareil, disponible sur le web et utilisé à des fins d’investigation dans le cadre d’une mission onusienne, n’a pas pu être installé en Libye pour des raisons sécuritaires, mais qu’il ne porte pas atteinte à l’État tunisien.

Au fil des semaines, les faits reprochés à Kartas n’ont pas été davantage précisés. Sofiène Sliti, porte-parole du parquet tunisien, balayait cependant les objections en estimant que l’accusé, soupçonné d’espionnage, « ne peut pas bénéficier d’une immunité dans la mesure où l’affaire dont il fait l’objet concerne des intérêts personnels ».

En coulisse, les canaux diplomatiques ont été sollicités. L’Organisation des Nations unies, qui avait dès l’arrestation de Moncef Kartas demandé aux autorités tunisiennes des explications, a multiplié les correspondances, soulignant l’immunité dont jouit Moncef Kartas et réitérant sa demande de libération. Selon le porte-parole du Secrétaire général de l’ONU, Stéphane Dujarric, qui qualifiait la semaine dernière la question de grave, il s’agit d’ « une violation des privilèges et immunités accordés à Moncef Kartas dans l’intérêt des Nations Unies ».

Largement médiatisée en Tunisie et à l’étranger, l’affaire a fait grand bruit avec la publication le 30 avril d’une tribune cosignée par une centaine de personnalités estimant que l’arrestation de l’expert revenait à une « violation grave des obligations internationales » de la Tunisie et que les « fallacieux » motifs de son incarcération soulèvent « de graves questions concernant l’État de droit en Tunisie ».

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