Nigeria : des milliers de membres présumés de Boko Haram jugés à huis clos à partir de lundi 9 octobre

Plus de 2 300 membres présumés du groupe jihadiste Boko Haram détenus dans des camps militaires du Nigeria doivent comparaître devant la justice de leur pays à partir du 9 octobre lors de procès inédits qui se tiendront dans le plus grand secret.

« Tout est prêt désormais pour la lecture des actes d’accusation des suspects de Boko Haram dans les différents centres de détention », a annoncé fin septembre le ministère de la Justice nigérian.

Quelque 1 670 personnes détenues dans un centre militaire de Kainji, dans l’Etat du Niger, seront d’abord jugées à partir du 9 octobre. Les dossiers de 651 détenus du camp Giwa à Maiduguri, capitale du Borno et épicentre du conflit, suivront de près.

Il s’agit du premier procès significatif de suspects de Boko Haram au Nigeria. La plupart sont détenus depuis des années dans le secret, sans avoir vu ni avocat ni juge.

Si des milliers de membres présumés de Boko Haram ont été arrêtés et placés en détention depuis le début du conflit qui a ravagé le nord-est du Nigeria il y a huit ans, les poursuites restent rares. À ce jour, seules 13 personnes ont été jugées et neuf condamnées pour leurs liens avec l’insurrection.

Les conditions dans lesquelles se dérouleront ces procès très attendus soulèvent le plus grand scepticisme sur la transparence du système judiciaire nigérian. Les audiences auront lieu à huis clos, au sein même des centres de détention militaires, sans accès pour la presse.

Le ministère a reconnu que de nombreux écueils attendent les juges, évoquant notamment des enquêtes mal menées en raison de l’insécurité en zone de guerre et d’une « trop grande dépendance aux preuves basées sur les aveux ».

Pression de la communauté internationale

Les groupes de défense des droits de l’homme dénoncent régulièrement les exactions présumées des forces de sécurité dans le pays.

Au moins 1 200 personnes ont été exécutées sommairement et plus de 20 000 arrêtées arbitrairement dans le cadre de la lutte contre Boko Haram, affirmait Amnesty International dans un rapport accablant de juin 2015.

L’ONG alertait également sur les conditions de détention des centres militaires, où 7000 personnes seraient mortes de faim, d’étouffement ou de tortures depuis 2011.

Aujourd’hui, « personne ne sait exactement combien de personnes sont détenues, si elles sont encore en vie et où elles se trouvent », affirme Isa Sanusi, chargé de communication pour Amnesty Nigeria.

Le président Muhammadu Buhari, élu en 2015, avait promis d’enquêter sur les accusations de violations des droits de l’homme.

Ces scandales ont incité les Occidentaux à la prudence malgré les demandes répétées de soutien militaire d’Abuja pour lutter contre l’insurrection qui a fait plus de 20 000 morts et 2,6 millions de déplacés.

Un accord de près de 600 millions de dollars, prévoyant notamment l’achat de 12 avions de chasse, avait été bloqué par l’administration Obama après un bombardement « accidentel » de l’armée nigériane d’un camp de déplacés qui a fait plus de 100 morts. L’achat a finalement été approuvé fin août par le Pentagone.

Pour Isa Sanusi, ces procès de masse sont avant tout une réponse à la pression internationale sur le gouvernement nigérian qui « cherche désespérément à se procurer des armes ».

Jeune Afrique

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