Café citoyen sur les droits digitaux : Un cadre d’échanges pour contribuer à la liberté de presse au Burkina

 

Dans l’après-midi de ce mardi 27 août 2019, le Centre d’information et de formation en matière de droits humains en Afrique (CIFDHA) a tenu un café citoyen sur les droits digitaux avec pour thème « Régulation de l’usage d’internet et des réseaux sociaux par le code pénal : faut-il craindre une remise en cause des droits et des libertés de l’internet et des médias au Burkina Faso ». Sous forme de panel, l’objectif de cette rencontre était d’échanger sur le nouveau code pénal.

Mystic Burkina, l’association des journalistes du Burkina, et la plateforme nationale du forum des organisations de la société civile d’Afrique de l’Ouest se sont retrouvés dans l’après-midi de ce mardi pour échanger et débattre sur le nouveau code pénal, notamment « la problématique de la régulation de l’utilisation de l’internet et des réseaux sociaux au niveau du Burkina Faso, régulation qui a émergé avec l’adoption d’une loi modificative du code pénal, notamment la loi 044 2019 AN du 21 juin qui a été promulguée par la suite après une décision de constitutionnalité du conseil constitutionnel », annonce Urbain Kiswensida Yaméogo, directeur exécutif du CIFDHA .

Cette nouvelle loi, est-elle une restriction à la liberté de presse et des droits digitaux ? Quelles sont ses conséquences sur les différents acteurs ? Ce café citoyen initié par le CIFDHA est un cadre d’échange sur la nouvelle loi. Il vise également « à défendre les droits humains et du public, sensibiliser le public sur le contenu et les implications de la loi ». Ce débat vise ainsi à sensibiliser sur les droits et liberté de l’internet, échanger sur les risques du code pénal, à contribuer pour le recule des dérives de l’utilisation de l’internet, et à participer à la lutte contre le terrorisme sans enfreindre les lois.

Les panélistes, à tour de rôle, ont donné leur appréciation sur les droits. Pour monsieur Yaméogo, « même si la loi est rentrée en vigueur, elle n’épuise pas pour autant le débat autour de la problématique, de ce que nous appelons les tentations liberticides de cette loi », explique-t-il puis d’ajouter : « Il est important que l’on puisse faire à la fois, un travail de sensibilisation pour que les uns et les autres puissent comprendre le contenu de la loi, ces implications et prendre éventuellement les dispositions nécessaires à cet effet, et éviter que les citoyens sans le savoir, sans le vouloir, ne tombent sous le coup de la loi ». Le CIFDHA s’est donc fixé pour objectif à travers ce café citoyen, de mieux expliciter cette loi. « Le premier objectif est la sensibilisation et la dissémination du contenu de cette loi. Le second objectif est de permettre un débat », a-t-il expliqué. Si la loi n’est pas comprise, des divergences naitront toujours car « les acteurs de la société civile peuvent profaner la loi, tandis que les représentants de l’Etat se mettent à louer la loi pour ses vertus », fait-il savoir. C’est pourquoi, « il est important de dialoguer ensemble pour voir qu’elles sont les craintes que la loi inspire aux uns et aux autres; si ces craintes sont légitimes ou pas, et qu’est ce qui peut être fait pour éventuellement en assurer l’amélioration », confie-t-il.

Ces clarifications peuvent ainsi éviter les retombées sur les journalistes aussi bien que sur les défenseurs des droits humains qui font un travail légitime d’information du public. Du reste, le droit à l’information (un droit constitutionnel), et la liberté d’expression sont des droits garantis par notre constitution, aussi par l’ensemble donc des instruments adoptés, ratifiés par le Burkina. « Nous ne sommes pas tout à fait d’accord avec certaines dispositions de la loi », déclare monsieur Yaméogo . En effet, la question d’incrimination des entreprises, de démoralisation des forces de défense et de sécurité, se pose. Cela peut « décourager » ceux qui font un travail légitime, avec plusieurs conséquences car ceux qui auront l’information juste, se gardent de la diffuser par crainte de ne tomber sous le coût de cette loi. « Lorsqu’il informe le public, ce n’est pas pour lui-même, c’est aussi pour participer au travail de sécurisation du public. Nous entendons lever les craintes que cela inspire aux journalistes, aux défenseurs des droits humains, parce qu’ils ont le droit éventuellement de mener des investigations, de collecter et de diffuser les informations relatives aux exactions. Ce n’est pas une entreprise de démoralisation des forces de défense et de sécurité », assure-t-il. Le CIFDHA ne manquera pas de pointer du doigt les insuffisances de cette loi pour espérer que dans l’application, elle se fera de façon rigoureuse et épargnera ceux qui feront un travail légitime d’information. Les conséquences collatérales de la loi, se font déjà ressentir. Suite aux derniers évènements, des rumeurs circulaient toujours sur les réseaux sociaux malgré l’adoption de cette loi. Or, la rumeur est beaucoup plus pernicieuse que lorsqu’un média se trompe dans la diffusion de l’information. « Il est important que l’on puisse porter l’information, que les uns et les autres puissent formuler des recommandations pour voir comment est-ce que l’on peut travailler éventuellement à améliorer les choses, à assurer les acteurs et la presse en particulier pour qu’ils puissent continuer leur travail légitime d’information du citoyen », affirme-t-il.

La loi permet de combler les dérives certes, mais elle ne respecte pas le principe de la légalité et de la constitutionnalité. Il faudra donner du temps à la loi, afin de constater les erreurs qui y sont liées avant de réagir. Si les acteurs font bien leur travail, ils n’ont pas à avoir peur de la loi. Et pour madame Paré Élisabeth, directrice de l’expertise numérique au ministère de l’économie numérique et des postes, représentant le gouvernement ,« toute personne a le droit de s’exprimer librement. Mais avec l’insécurité, il est important que des mesures soient prises pour une communication saine et utile à notre pays », rappelle-t-elle. Elle ne consiste pas à museler la presse, en plus elle ne concerne que la communication, la diffusion et la propagation des fausses informations, les positions géographiques, les images… « La modification du code pénal n’est ni liberticide, ni restrictive. Au contraire, elle protège les citoyens », a-t-elle indiqué.

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