Agressions en Inde: des diplomates africains dénoncent le manque de réaction

La semaine dernière, un jeune Indien disparaît d’un quartier de la banlieue de New Delhi. Les voisins affirment l’avoir vu avec des Nigérians et accusent donc ces derniers de l’avoir tué, voire de l’avoir mangé, rapporte notre correspondant à New Delhi, Sébastien Farci. Le garçon est finalement retrouvé mort dans la rue, la police assure que les Africains ne sont pas responsables. C’est alors que des dizaines d’Indiens passent cinq Nigérians à tabac. La ministre des Affaires étrangères dit regretter ces actes criminels isolés, plusieurs personnes sont arrêtées, mais jamais il n’est question pour elle de « racisme ».

Vendredi, une quarantaine de diplomates africains ont donc rédigé un communiqué de presse, publié lundi, condamnant gravement la hausse des attaques racistes dans le pays et menaçant New Delhi de porter l’affaire devant les instances internationales. Une démarche assez rare pour être soulignée. Ils y accusent les autorités indiennes de ne pas « suffisamment condamner » les agressions dont sont parfois victimes les Africains. « Nous considérons que les récentes attaques contre des Africains sont xénophobes et racistes par nature, et que le gouvernement indien ne les a pas suffisamment condamnées. »

La réprobation du groupe des ambassadeurs africains en Inde est forte et pointe du doigt un problème récurrent : les autorités indiennes refusent de considérer les fréquentes agressions contre des Africains  comme des actes racistes et donc d’agir pour éviter qu’elles se répètent. Parce que les incidents de la semaine dernière ne sont pas les premiers du genre. Un jeune Congolais a même été tué en pleine rue, l’an dernier, après une querelle avec un chauffeur de rickshaw.

 Mais la réaction de Delhi aujourd’hui a été tout sauf vigoureuse. Le ministère des Affaires étrangères a dit déplorer que les violences aient été qualifiées de « xénophobes » et « raciales » par des diplomates avant la conclusion de l’enquête de police. Le ministère rappelle qu’il avait réagi rapidement en décrivant le passage à tabac des Nigérians comme « inacceptable ». Selon le communiqué, les institutions indiennes suffiront à faire face à des crimes qualifiés d’« aberrations ».

New Delhi essaie d’accroître les échanges économiques avec ces pays émergents africains et leur a même offert 50 000 bourses d’études. Mais les ambassadeurs en ont assez des belles paroles : ils ont pour la première fois affirmé qu’ils étaient prêts à porter l’affaire devant le Conseil des droits de l’homme de l’ONU.

Presidoe Okuguni, étudiant nigérian, est le porte-parole de l’Association des étudiants africains à Delhi. Selon lui, les diplomates ont raison de dénoncer le caractère «racial» des agressions dont les Africains font régulièrement l’objet.« Le gouvernement n’est ni franc, ni honnête lorsqu’il aborde ce sujet. Il ne le prend pas vraiment au sérieux. C’est pour cela que ces agressions se poursuivent, estime-t-il. C’est sans arrêt ! Et cela va continuer si le gouvernement ne fait pas quelque chose pour y mettre un terme, s’il ne prend pas le taureau par les cornes, parce que c’est profondément ancré dans le système des castes. Le racisme se manifeste de tellement de façons en Inde ! C’est sans arrêt ! Je l’ai encore vu aujourd’hui. J’attendais l’autobus pour aller à l’université et un Indien qui m’a vu a fait des remarques très, très insultantes avant d’éclater de rire. C’est ce que nous vivons tous les jours. On nous considère comme pas tout à fait humains. »

rfi/Afrique

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