20è anniversaire du Statut de Rome : Me Sankara plaide pour que la CPI connaisse des cas de corruption

 

Le vice-président de l’Assemblée nationale du Burkina Faso, Me Bénéwendé Stanislas Sankara a plaidé le 17 juillet 2018, à La Haye, aux Pays-Bas, afin que la Cour pénale internationale (CPI) connaisse aussi des cas liés à la corruption, «un crime préjudiciable au développement des Etats et qui maintient les populations dans la pauvreté».

Devant la barre de la CPI -devenue pour le temps d’une commémoration, une tribune- le vice-président de l’Assemblée nationale burkinabè a d’abord réitéré l’engagement du Burkina Faso en faveur du Statut de Rome.

«Au moment où la CPI fait l’objet de vives critiques, au moment où de vifs assauts sont lancés contre le Statut de Rome, les victimes attendent que justice leur soit rendue et en adhérant à la CPI, le Burkina Faso veut que leurs cris de douleurs soient entendus. Pour le Burkina Faso, la Cour demeure le meilleur instrument pour mettre fin à l’impunité», a lancé Me Sankara.

Insistant sur les idéaux de lutte contre l’impunité et la corruption qui ont caractérisé sa vie, le vice-président du parlement burkinabè, ci-devant, président de l’Union pour la renaissance/Parti sankariste (UNIR/PS) a lancé : «Parce que la justice est nécessaire pour le développement, la Cour devrait se saisir de la lutte contre la corruption, un crime préjudiciable au développement de beaucoup de nos États et qui maintient ou conduit nos populations à la pauvreté voire à la misère», a-t-il plaidé.

Me Sankara qui s’exprimait au siège de la CPI à La Haye à l’occasion des activités commémoratives du 20è anniversaire du Statut de Rome, le traité fondateur de la Cour pénale internationale (CPI) a rappelé certaines critiques formulées à l’encontre de la Cour et appelé ses animateurs à être plus proches des États membres.

Ce 20è anniversaire du traité fondateur de la CPI a été célébré en présence de représentants de haut niveau de plus de 30 États membres dont le chef de l’État nigérian Muhammadu Buhari.

Appelant les États qui n’ont pas encore adhéré au Statut de Rome à le faire afin que la CPI soit un tribunal universel, le président Buhari, connu comme le chantre de la lutte contre la corruption en Afrique a rappelé qu’ «une CPI forte et efficace démontre(rait) l’attachement de la communauté internationale à l’État de droit».

Quant à la Procureure de la CPI, la gambienne Fatou Bensouda, elle a, à l’aune de sa pratique du Statut de Rome, appelé les États membres à réfléchir aux moyens de rendre le système du Statut de Rome plus efficace. «Alors que nous commémorons le 20ème anniversaire de l’adoption du Statut de Rome, nous nous devons, à nos enfants et aux générations futures, de soutenir et de préserver pleinement le système de justice pénale internationale en constante évolution, et la CPI en tant que pilier central», a-t-elle indiqué.

Le président de la CPI, le juge nigérian Chile Eboe-Osuji, a rappelé de son côté que le Statut de Rome avait été adopté avec la vision d’un monde dans lequel les atrocités qui choquent la conscience de l’humanité ne seraient plus commises en toute impunité. Il a dit que les réflexions sur le 20ème anniversaire du traité devraient se concentrer sur ce que cette nouvelle génération va faire avec l’héritage «monumental» que lui a légué les «visionnaires» qui ont lancé la CPI en 1998 en adoptant ses statuts à Rome, dans la capitale italienne.

«Veillons à ce que les allégations de crimes les plus graves soient accueillies par une réponse judiciaire solide, équitable et impartiale -au niveau international en dernier recours, lorsque les systèmes nationaux s’avèrent incapables de donner aux victimes leur droit à la justice. Faisons en sorte de ne pas abandonner ceux qui ont travaillé si dur pour faire du Statut d’une Cour pénale internationale une réalité» a plaidé –ce n’est pas de coutume pour lui-, le président de la CPI, le juge Eboe-Osuji.

Une cour contre les Africains

Cette commémoration du 20è anniversaire de la CPI a été marquée par un symposium au cours duquel les débats ont tourné autour du droit des victimes, du financement de la Cour dont le budget stagne depuis cinq ans. Les idées reçues sur une CPI qui serait tournée «uniquement contre les Africains», ou «une justice des blancs» ou des «vainqueurs contre les vaincus» a fait l’objet de vifs échanges. Il en ressort que dans quasiment tous les dossiers traités par la Cour, ce sont les États africains qui ont, de leurs propres chefs, saisi la CPI.

La récente libération de Jean-Pierre Bemba Gombo, le leader de l’ex rébellion congolaise du Mouvement de libération du Congo (MLC) alors poursuivi pour des crimes de guerre commis en République centrafricaine au début des années 2000 a fait l’objet d’échanges, chacun y allant de ses argumentaires sur la décision des juges de la CPI, qui se sont naturellement bien gardés de revenir publiquement sur les débats qui ont conduit à cette décision.

Le fait que certains États surtout ceux membres du Conseil de sécurité des Nations Unies comme les États-Unis, la Russie ou la Chine se soient soustraits à la Cour fait aussi l’objet de débats. Un des juges de la Cour, a fait observer que par le truchement du Conseil de sécurité, ces États continuent d’instruire à la Cour d’engager des poursuites contre des citoyens d’autres États alors qu’eux-mêmes ne sont parties au Statut de Rome. Cela, se désole, le juge,  nourrit légitimement les critiques contre la Cour qui fait parfaitement son travail.

A la veille de l’audience solennelle commémorative du Statut de Rome, la CPI a organisé le 16 juillet 2018, dans les locaux de la Cour suprême des Pays-Bas, à La Haye, un procès fictif dans lequel un jeune capitaine est attrait devant elle pour crimes de guerre. Le jeune pilote est accusé d’avoir commis un crime de guerre en dirigeant un raid aérien contre un village sans défense le réduisant complètement en décombres. Il s’agissait pour le tribunal fictif, de déterminer si le jeune officier subalterne a agi sous la contrainte, en obéissant aux ordres de ses supérieurs, s’il souffrait de déficit ou de déficience mentale au moment des faits comme il le prétend et méritait à ce titre de circonstances atténuantes. En effet, le jeune pilote, affirme avoir agi sous l’autorité de ses chefs militaires qu’il n’aimait pas par ailleurs, et qui le lui rendait bien, qu’en outre, il s’était engagé dans l’armée sans savoir qu’on l’enverrait tuer des populations civiles et qu’il redoutait la Cour martiale s’il désobéissait aux ordres. Au final, le jury composé d’ambassadeurs en poste à La Haye, a relaxé le jeune pilote de guerre. Quoiqu’il convienne de noter que la CPI n’a pas de jury.

Le Statut de Rome, le traité fondateur de la Cour pénale internationale (CPI) a été adopté le 17 juillet 1998 dans la capitale italienne. Reconnue aujourd’hui par 120 pays, la CPI est la première cour pénale internationale permanente créée pour mettre fin à l’impunité des auteurs des crimes liés notamment au génocide, aux crimes contre l’humanité, aux crimes de guerre et au crime d’agression.

Le Statut de Rome, fondateur de la CPI, a aussi créé un Fonds au profit des victimes qui dispose d’un double mandat : mettre en œuvre les réparations ordonnées par la Cour et apporter une réhabilitation physique, psychologique et matérielle aux victimes survivantes, à leurs familles et aux communautés affectées. Le FPV assiste les survivants afin qu’ils puissent commencer le processus de guérison et reconstruire leur vie, et puissent promouvoir la réconciliation et la paix. Le japonais Motoo Noguchi est l’actuel président du Conseil de direction du Fonds.

Romaric Ollo HIEN

Ambassade du Burkina Faso à Bruxelles

Mission auprès de l’Union européenne

Représentation permanente auprès de la CPI

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